Dakar somme Biram Dah Abeid de cesser ses activités politiques au Sénégal : pression diplomatique ou dérive sécuritaire ?

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SENTV : Le ton est monté entre Dakar et Nouakchott, mais c’est un militant des droits humains qui en paie le prix. Biram Ould Dah Abeid, député mauritanien et figure emblématique de la lutte contre l’esclavage, a été convoqué ce samedi par le ministre sénégalais de l’Intérieur, Jean Baptiste Tine. À l’issue de cette rencontre, il lui a été signifié l’interdiction formelle de poursuivre ses activités politiques sur le territoire sénégalais.

Selon l’intéressé, cette décision fait suite à des plaintes officielles formulées par le régime mauritanien, accusant Biram Dah Abeid d’avoir tenu des propos « violents et incitant à la haine ». Une version qu’il rejette catégoriquement : « Je n’ai jamais, au cours de mon parcours, prôné la violence. Mon combat est politique, pacifique et ancré dans la défense des droits humains », a-t-il déclaré à la RFM.

Un militant sous surveillance, une diplomatie sous pression
Connu pour son engagement contre l’esclavage en Mauritanie, Biram Dah Abeid est également président de l’IRA (Initiative pour la Résurgence du mouvement Abolitionniste), une organisation non reconnue par les autorités de son pays. Récompensé à l’international pour son militantisme, il est régulièrement ciblé par le pouvoir de Nouakchott, qu’il accuse d’entretenir un système d’inégalités raciales et sociales.

La convocation du leader abolitionniste à Dakar s’inscrit dans un contexte diplomatique délicat. Les autorités sénégalaises, soucieuses de ménager leurs relations avec le régime mauritanien, semblent avoir cédé à la pression en lui imposant une suspension de toute activité à caractère politique sur le sol national.

Entre diplomatie régionale et droits fondamentaux
Cette interdiction soulève de vives inquiétudes parmi les organisations de défense des droits de l’homme. Plusieurs ONG locales et internationales dénoncent ce qu’elles qualifient de « recul inquiétant de la liberté d’expression » au Sénégal, un pays historiquement perçu comme un havre de tolérance pour les dissidents africains.

De son côté, Biram Dah Abeid se veut rassurant mais déterminé : « Je suis profondément attaché à la relation entre la Mauritanie et le Sénégal. Je n’ai jamais œuvré à la déstabilisation d’un pays frère. Mais je n’abandonnerai jamais mon combat pour la dignité, l’égalité et la justice ».

Un précédent qui pourrait faire jurisprudence ?
Cette décision ouvre un débat sensible : jusqu’où un État peut-il aller pour préserver ses relations diplomatiques sans compromettre ses engagements en matière de libertés fondamentales ? Si Dakar justifie sa position par des impératifs de sécurité et de coopération sous-régionale, d’aucuns craignent qu’elle n’inaugure une ère de surveillance accrue des exilés politiques et activistes étrangers.

La rédaction de la SENTV.info 

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