Présidentielle ivoirienne : Ouattara en piste, l’opposition en pièces

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SENTV : À deux semaines du premier tour de l’élection présidentielle prévu le 25 octobre, la Côte d’Ivoire entre dans la dernière ligne droite d’une campagne qui s’annonce disputée… mais déséquilibrée. En effet, le président sortant Alassane Ouattara, en quête d’un troisième mandat effectif, apparaît comme le favori incontesté du scrutin, face à une opposition morcelée et désorganisée.

Ce samedi marque le coup d’envoi officiel de la campagne électorale, avec les premiers grands rassemblements prévus à Abidjan et à l’intérieur du pays. Pourtant, dans les rangs de l’opposition, l’élan peine à prendre.

Quatre candidats ont été retenus par le Conseil constitutionnel : Alassane Ouattara, Simone Gbagbo, Pascal Affi N’Guessan et Tidjane Thiam. Mais à ce jour, aucun d’entre eux ne semble en mesure de rassembler les forces de l’opposition autour d’un projet commun. Selon Florence Richard, journaliste à Jeune Afrique et spécialiste de la politique ivoirienne, interviewée par RFI,

« Il paraît peu probable qu’un candidat parvienne, à ce stade, à rassembler l’ensemble des forces d’opposition. »

Simone Gbagbo, ancienne Première dame et fondatrice du mouvement MGC, a tenté d’initier une dynamique d’unité en mars dernier avec la Coalition pour une alternance pacifique en Côte d’Ivoire (CAP-CI). Cette plateforme réunissait plus d’une vingtaine de partis, dont le PDCI de Tidjane Thiam et le FPI de Pascal Affi N’Guessan. Mais faute d’accord sur un candidat unique, le projet d’un front commun a rapidement perdu de sa cohérence.

Tidjane Thiam, un candidat absent du terrain

Candidat du PDCI-RDA, Tidjane Thiam poursuit son offensive diplomatique hors du territoire ivoirien. Absent de Côte d’Ivoire depuis plus de six mois, l’ancien banquier international mène une campagne atypique, axée sur les lobbyings internationaux et les appels à des élections transparentes et inclusives.

Sa stratégie, bien qu’ambitieuse sur le plan diplomatique, laisse un vide sur le terrain. Pendant ce temps, le président Ouattara capitalise sur un appareil d’État bien rodé et sur une présence constante dans le débat public, notamment à travers des tournées économiques et des annonces d’investissements publics.

De son côté, Laurent Gbagbo, fondateur du Parti des Peuples Africains – Côte d’Ivoire (PPA-CI), a reçu ces dernières semaines plusieurs figures politiques exclues du scrutin, notamment Tiémoko Antoine Assalé et Affi N’Guessan. Une tentative d’apaisement et de rassemblement des recalés ? Peut-être. Mais pour l’instant, l’ancien président n’a pas pris position clairement, ni apporté un soutien formel à un candidat.

Dans un climat politique toujours marqué par les tensions postélectorales de 2020, les autorités ont renforcé le dispositif sécuritaire. La marche pacifique prévue le 4 octobre dernier par le CAP-CI a été interdite à la dernière minute, comme toutes les manifestations remettant en cause les décisions du Conseil constitutionnel. Un signal fort envoyé aux opposants, et un climat de méfiance qui plane sur la campagne.

Des organisations de la société civile, telles que Indigo Côte d’Ivoire ou Tournons la Page, ont déjà exprimé leur inquiétude face à un rétrécissement de l’espace civique et un encadrement strict des libertés politiques.

Avec une opposition divisée, un appareil sécuritaire sous contrôle, et une base électorale stable dans le Nord et les grandes villes, Alassane Ouattara apparaît comme le grand bénéficiaire de cette configuration politique. L’actuel chef de l’État, qui a déjà survécu à de multiples contestations et critiques sur la légalité de son troisième mandat, semble en route vers une réélection sans véritable rival de taille.

À moins d’un sursaut de dernière minute ou d’une alliance de l’opposition autour d’un candidat surprise, la présidentielle ivoirienne de 2025 risque de s’inscrire dans une logique de continuité. Le pluralisme existe sur le papier, mais l’absence d’un front uni face au pouvoir affaiblit considérablement les chances d’alternance démocratique.

Une situation qui rappelle que, dans de nombreux contextes africains, l’élection ne suffit pas à garantir le jeu démocratique, si les règles du scrutin, les institutions et les forces politiques ne sont pas à égalité.

La rédaction de la SENTV.info

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