BTP sénégalais : entre tentation de l’exil et espoir de relance

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SENTV : Le secteur du bâtiment et des travaux publics (BTP) traverse une zone de turbulences au Sénégal. Retards de paiement, baisse des marchés publics, inflation sur les matériaux : le climat des affaires s’est durci pour les entreprises locales. Une situation qui pousse plusieurs patrons à envisager une issue radicale — s’installer ailleurs en Afrique.

C’est en ces termes qu’Oumar Ndir, président du Syndicat professionnel des Entrepreneurs de Bâtiments et Travaux publics du Sénégal (SPEBTPS), a tiré la sonnette d’alarme dans l’édito du second numéro de leur bulletin mensuel. « La plupart des dirigeants du BTP avec lesquels nous avons échangé récemment nous ont fait part de la nécessité de chercher des débouchés en dehors des frontières nationales : autrement dit, de délocaliser tout ou partie de leur activité ailleurs en Afrique », a-t-il confié.

Dans les coulisses du secteur, le constat est unanime : les entreprises peinent à maintenir leur équilibre financier. Les projets d’infrastructures, longtemps moteurs de croissance, se raréfient ou accusent des retards de décaissements. Le secteur privé, quant à lui, n’arrive pas à compenser ce vide. Résultat : une pression accrue sur les trésoreries des PME et une perte de confiance progressive.

« Ce n’est pas une fuite, c’est une stratégie d’adaptation », nuance un chef d’entreprise basé à Thiès. « Aujourd’hui, des marchés s’ouvrent en Côte d’Ivoire, au Togo, au Bénin ou encore au Rwanda. Ils offrent de réelles opportunités que nous ne pouvons plus ignorer », ajoute-t-il.

Le dynamisme économique de certains pays africains alimente cette envie d’ailleurs. La Côte d’Ivoire, par exemple, enregistre une croissance supérieure à 6 % selon la Banque mondiale, portée notamment par des investissements massifs dans les infrastructures. Idem pour le Rwanda, salué pour la fluidité de son climat des affaires.

Mais pour Oumar Ndir, cette envie d’exportation, aussi légitime soit-elle, doit rester mesurée. « Elle ne doit pas nous conduire à prendre des décisions hâtives, et encore moins à envisager de quitter le Sénégal », tempère-t-il. Le président du syndicat reste convaincu que la relance est possible et proche.

Le récent Forum « Invest in Sénégal » (Fii Sénégal 2025), organisé par l’APIX, a selon lui envoyé un signal fort : « Notre pays continue d’attirer les investisseurs, preuve que le potentiel est toujours là. » Pour Oumar Ndir, le BTP doit se préparer à accompagner cette relance, en misant sur la résilience et la structuration du secteur.

En parallèle, le syndicat appelle les autorités à assainir le climat contractuel, à raccourcir les délais de paiement des marchés publics, et à offrir plus de visibilité aux entreprises locales. « Nous voulons participer pleinement à la construction nationale, mais il faut que l’environnement le permette », conclut-il.

La tentation de l’exil des entrepreneurs du BTP révèle un malaise profond, mais aussi une capacité d’adaptation. Entre découragement face aux lenteurs administratives et opportunisme stratégique vers des marchés voisins, le secteur se trouve à un tournant. La question est désormais de savoir si le Sénégal saura lui offrir les conditions d’un vrai redémarrage… avant qu’il ne soit trop tard.

La rédaction de la SENTV.info

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