Extradition de Madiambal Diagne : l’heure de vérité à Versailles, entre manœuvres judiciaires et bataille d’images

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SENTV : Le dossier explosif de l’homme de presse sénégalais Madiambal Diagne entre ce mardi dans une phase décisive. La Chambre d’instruction de la Cour d’appel de Versailles, juridiction compétente en matière d’extradition, se penche sur la demande formulée par les autorités sénégalaises pour son retour à Dakar.
Cette audience, très attendue, doit permettre de déterminer si la procédure engagée par le Sénégal respecte les standards internationaux, notamment en matière de garanties judiciaires, de droits de la défense et de non-persécution politique.

Selon plusieurs sources concordantes, Madiambal Diagne, fondateur du groupe de presse Avenir Communication (éditeur du quotidien Le Quotidien), a quitté le Sénégal par la Gambie au moment où un mandat d’arrêt international venait d’être émis à son encontre.
Le journaliste est ciblé par la Cellule nationale de traitement des informations financières (Centif) dans le cadre d’une enquête portant sur des transferts suspects de 12 milliards de F CFA, liés à un marché de sous-traitance estimé à près de 21 milliards de francs CFA avec le groupe Ellipes Project.

À Dakar, cette affaire a déjà eu des répercussions familiales lourdes : l’épouse du journaliste et leurs deux enfants majeurs, associés au sein de la SCI Pharaon, ont été interpellés et placés sous mandat de dépôt, soupçonnés d’avoir participé à des opérations financières liées au même contrat.

Une défense organisée autour d’une “réunion stratégique” à Paris

En France, Madiambal Diagne a constitué une équipe mixte d’avocats sénégalais et français, décidée à contrer la procédure d’extradition.
Selon L’Observateur, une réunion stratégique s’est tenue à Paris au cours du week-end pour harmoniser les arguments et préparer l’audience de Versailles.
L’objectif affiché de la défense est clair : obtenir l’annulation de la demande d’extradition en contestant la régularité du mandat sénégalais et en invoquant les risques d’un procès inéquitable en cas de retour à Dakar.

Un proche du dossier confie que les avocats entendent produire plusieurs supports numériques — dont des clés USB — contenant des éléments vidéo et des publications censés démontrer une campagne de dénigrement systématique contre leur client sur les réseaux sociaux.
Ces supports comprendraient également des séquences des arrestations des journalistes Babacar Fall et Maïmouna Ndour Faye, interpellés après avoir réalisé des interviews avec Madiambal Diagne.

L’audience de ce mardi s’annonce particulièrement scrutée, à la fois par les milieux judiciaires et par les observateurs de la presse.
En France, les juges de Versailles devront examiner la conformité du mandat sénégalais aux engagements bilatéraux liant les deux pays, notamment la Convention européenne des droits de l’homme et les conventions d’extradition franco-sénégalaises.

Mais au-delà du droit, c’est aussi l’image publique de Madiambal Diagne qui se joue. L’ancien président du Conseil pour le respect de l’éthique et de la déontologie dans les médias (CRED) se présente comme victime d’une chasse politique, liée à ses prises de position critiques durant les dernières années du régime de Macky Sall et les débuts du pouvoir actuel.

De leur côté, les autorités sénégalaises affirment que l’affaire est purement financière, et non politique, rappelant que la Centif agit dans le cadre d’une enquête sur des flux bancaires transnationaux, soupçonnés d’enrichissement illicite et de blanchiment de capitaux.

Le cas Madiambal Diagne intervient dans un contexte où les coopérations judiciaires franco-sénégalaises sont particulièrement sensibles.
Ces dernières années, Paris a répondu à plusieurs demandes d’entraide du Sénégal dans des affaires de corruption et de fraude économique, mais les procédures d’extradition demeurent rares et souvent politiquement chargées.
L’enjeu pour la Cour d’appel de Versailles est donc d’éviter toute interprétation diplomatique, tout en respectant la légalité stricte des échanges judiciaires entre les deux pays.

Une décision très attendue

La Chambre d’instruction ne devrait pas rendre sa décision immédiatement. En général, un délai de plusieurs semaines est observé pour permettre un examen approfondi du dossier et la présentation d’éventuelles pièces complémentaires.
En attendant, Madiambal Diagne demeure en liberté sur le territoire français, sous la protection de ses avocats, en attendant que le juge décide s’il sera remis ou non aux autorités sénégalaises.

Qu’elle soit confirmée ou rejetée, la décision de Versailles marquera un tournant dans l’affaire Madiambal Diagne.
Elle déterminera non seulement le sort personnel du journaliste, mais aussi la crédibilité des procédures sénégalaises aux yeux de la justice française, dans un dossier où la politique, les affaires et la liberté de la presse se croisent dangereusement.

La rédaction de la SENTV.info

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