CBAO : un second cadre épinglé dans l’affaire des codes piratés et du détournement de 150 millions F CFA
SENTV : L’enquête sur le scandale financier de l’agence CBAO de Bakel franchit un nouveau cap. Après les premiers aveux avortés et la chute d’un chargé de compte, c’est désormais un ancien superviseur qui se retrouve dans l’œil du cyclone judiciaire.
Un dossier tentaculaire qui remonte jusqu’à Dakar
Le dossier du détournement massif qui secoue la CBAO depuis plusieurs semaines continue de livrer ses zones d’ombre. Alors que l’affaire semblait cantonnée au parquet de Tambacounda, les investigations se sont élargies jusqu’à Dakar, où la Division spéciale de la cybercriminalité (DSC) a procédé à une arrestation supplémentaire dans la soirée d’avant-hier.
Selon des sources concordantes, Aboubacary Sow, ancien superviseur de l’agence CBAO de Bakel, a été interpellé par les enquêteurs spécialisés, puis déféré au parquet. Son nom apparaît désormais officiellement dans un dossier qui a déjà envoyé en prison Abdoulaye Diébakhaté, premier mis en cause et ancien chargé de compte de la même agence.
Un engrenage frauduleux au cœur de l’institution
L’affaire remonte au 20 novembre 2025, lorsque les auditeurs internes de la banque découvrent un trou abyssal de 130,9 millions F CFA, imputé à Diébakhaté. Ce dernier, affecté à Galoya comme directeur intérimaire, avait promis de rembourser avant d’être finalement arrêté pour un détournement devenu impossible à étouffer.
Mais les enquêteurs ne s’attendaient pas à un second volet encore plus troublant : une nouvelle série d’opérations frauduleuses, d’un montant total de 28,826 millions F CFA, a été réalisée non pas avec les identifiants du premier mis en cause… mais avec le code d’accès professionnel d’Aboubacary Sow.
Ce rebondissement change radicalement la configuration du dossier.
Un compte de cliente décédée exploité comme une caisse noire
Les éléments recueillis par la DSC révèlent un mode opératoire particulièrement déroutant : le code de Sow a servi à consulter et à manipuler le compte… d’une cliente décédée, à partir duquel plusieurs retraits ont été opérés. Une intrusion informatique d’autant plus grave qu’elle suggère une utilisation volontaire ou une négligence lourde de conséquences.
Face aux enquêteurs, l’ancien superviseur adopte une stratégie défensive : il assure que son collègue Diébakhaté aurait « piraté » son accès professionnel, évitant de reconnaître toute implication directe. Mais sa ligne de défense s’est rapidement fragilisée lorsqu’il a proposé à la banque un moratoire de remboursement, admettant que « sa responsabilité demeure engagée dans tous les cas », selon des sources citées.
Des accusations lourdes et une affaire loin d’être bouclée
Le parquet a retenu contre Aboubacary Sow un faisceau de charges particulièrement sévères :
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Association de malfaiteurs
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Faux et usage de faux en écriture bancaire privée
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Accès et maintien frauduleux dans un système informatique
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Détournement de fonds au préjudice de son employeur
L’affaire, qui cumule désormais plus de 150 millions F CFA envolés, ne semble pas près de s’éteindre. D’autres auditions sont en cours, et les enquêteurs s’intéressent à d’éventuelles complicités internes, tant les failles exploitées révèlent une connaissance fine des rouages de l’agence.
Un scandale qui met à nu les vulnérabilités du secteur bancaire
Au-delà des responsabilités individuelles, ce dossier soulève des questions fondamentales sur les mécanismes de sécurité internes des banques. Comment un superviseur et un chargé de compte ont-ils pu manipuler des codes professionnels et accéder à des comptes sensibles sans détection immédiate ? Comment expliquer qu’un compte appartenant à une cliente décédée ait pu être transformé en outil de siphonnage pendant des semaines ?
La CBAO, qui n’a pas encore communiqué publiquement dans le détail sur cette nouvelle arrestation, devra tôt ou tarde répondre à ces interrogations.