Côte d’Ivoire : un manifestant tué à Bonoua, l’opposition intensifie la pression à deux semaines de la présidentielle
SENTV : À moins de deux semaines d’un scrutin présidentiel sous haute tension, la Côte d’Ivoire est à nouveau secouée par une poussée de contestation populaire. Lundi, un jeune homme de 22 ans a perdu la vie à Bonoua (sud du pays) lors d’une manifestation contre la candidature d’Alassane Ouattara à un quatrième mandat. La police a confirmé mardi que la victime avait été atteinte par un tir provenant d’un véhicule non identifié.
Selon le communiqué de la police nationale, le jeune manifestant a été mortellement touché à la mâchoire par un projectile, tiré depuis un 4×4 par des individus non identifiés. Transporté en urgence, il a succombé à ses blessures dans la soirée de lundi. Une enquête a été ouverte, mais aucun suspect n’a pour l’instant été identifié ou interpellé.
L’incident survient dans un contexte politique particulièrement tendu. Les tensions ont redoublé depuis le rejet des candidatures de deux figures majeures de l’opposition : Laurent Gbagbo (PPA-CI) et Tidjane Thiam (PDCI). Le Conseil constitutionnel a invalidé leurs dossiers, une décision fortement contestée par leurs partisans.
En réaction, le Front commun, une alliance formée par les deux partis d’opposition historiques – le PDCI et le PPA-CI –, a lancé un mot d’ordre de mobilisation permanente. « Nous appelons à manifester chaque jour pour défendre nos droits et la démocratie », a déclaré dimanche la porte-parole du Front, Habiba Touré.
Malgré l’interdiction des rassemblements non autorisés par les autorités, plusieurs manifestations ont été signalées lundi et mardi dans des bastions de l’opposition, notamment dans la région de la Mé, à Gagnoa et à Bonoua.
Les forces de l’ordre ont procédé à de nombreuses arrestations. Une source sécuritaire indique que 710 personnes ont été interpellées entre samedi et dimanche, notamment lors d’une marche interdite à Abidjan qui a été dispersée à coups de gaz lacrymogène.
Alors que le climat social se tend, le président sortant et candidat à sa propre succession, Alassane Ouattara, a tenté de rassurer. En déplacement à Yamoussoukro, il a affirmé que « tout sera mis en œuvre pour garantir des élections transparentes, sécurisées et respectueuses des règles démocratiques ».
« Je veux dire à tous les Ivoiriens que notre démocratie n’a pas besoin de violence pour s’exprimer », a-t-il ajouté, appelant au calme.
Depuis son accession au pouvoir en 2011, M. Ouattara a traversé plusieurs cycles électoraux violents. Les plus meurtriers remontent à la crise postélectorale de 2010-2011 (environ 3 000 morts) et à la présidentielle de 2020 (85 morts). Si les dernières élections locales se sont déroulées sans incident majeur, la candidature contestée de M. Ouattara à un quatrième mandat ravive les tensions.
En dépit du rejet de figures de poids, l’opposition reste en lice avec quatre candidats, dont Jean-Louis Billon (ex-PDCI), Simone Gbagbo (ex-première dame), Ahoua Don Mello (ancien ministre), et Henriette Lagou, candidate en 2015.
Le Front commun a annoncé son intention de tenir une nouvelle « grande marche nationale », sans en préciser la date. Sur le terrain, la mobilisation ne faiblit pas. Les prochains jours s’annoncent décisifs pour l’opposition, alors que le pouvoir mise sur la fermeté pour préserver l’ordre public.
Entre espoir de changement et crainte d’un nouvel embrasement, la Côte d’Ivoire aborde cette élection.
La rédaction de la SENTV.info