Cyberfraude entre Dakar et Abidjan : un réseau international détourne plus de 10 milliards FCFA via une fausse plateforme de placement

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SENTV : Ce qui semblait être une opportunité d’investissement en ligne s’est transformé en cauchemar pour des centaines de Sénégalais. Une gigantesque escroquerie numérique, orchestrée depuis Dakar et relayée jusqu’en Côte d’Ivoire, a permis le détournement de plus de 10 milliards de francs CFA en moins d’un an. En toile de fond : une entreprise-écran, des identités fictives, et un circuit opaque mêlant ressortissants chinois, français et sénégalais.

L’affaire, révélée par Libération, repose sur une mécanique désormais bien connue dans le monde de la cyberfraude : des publications sponsorisées sur Facebook font la promotion de « Seyp Sénégal », une plateforme de placement en ligne prétendument affiliée à Seymour Power, société britannique. Les internautes intéressés reçoivent un lien envoyé par une dénommée Zoé Young, les incitant à déposer une mise de départ via Wave, service de transfert d’argent mobile.

Une fois les fonds envoyés, plus aucun retour. Aucune rentabilité. Aucune plateforme de contact fiable. La supercherie est totale.

Alertée par une avalanche de plaintes, la Division spéciale de cybersécurité (DSC) a ouvert une enquête, rapidement recentrée sur une société basée à Dakar, Sunutech LTD. D’après les premiers éléments, cette structure est contrôlée par deux ressortissants chinois, Xing Xiao et Lifan Hu, agissant en toute discrétion depuis plusieurs mois.

Outre Wave, Sunutech utilisait aussi Orange Money, Pixe-Lov, Income et Connekt4 Sénégal/Côte d’Ivoire pour récolter les fonds, tout en les faisant circuler hors des circuits bancaires traditionnels – rendant leur traçabilité extrêmement difficile.

Les enquêteurs ont d’abord recensé 58 000 transactions douteuses entre octobre 2024 et mai 2025, représentant 2,5 milliards FCFA. Mais les investigations approfondies ont révélé une fraude totale dépassant les 10 milliards FCFA, répartis entre plusieurs canaux de collecte et de blanchiment.

Dans cette affaire, quatre Sénégalais ont été identifiés et convoqués par la DSC : I. Seck, A. Dia, M. L. Ndiaye et B. Ly. Ils ont reconnu avoir participé aux opérations logistiques de collecte et de redistribution, tout en affirmant ignorer la nature frauduleuse du montage. Ils sont actuellement placés en garde à vue.

Deux ressortissants français, Jean-Paul G. L. Perrotte – présenté comme un ancien militaire – et Mireille C. Katouzian, juriste affiliée à Connekt4, ont également été cités. Aucun des deux n’a répondu à la convocation. Le premier se serait réfugié en Côte d’Ivoire, la seconde est injoignable depuis plusieurs semaines.

Enfin, un troisième ressortissant chinois, Hang Zho, aurait perçu 67 millions FCFA dans le cadre de transactions illicites. Tous trois ont quitté le territoire sénégalais depuis mai 2024, renforçant la thèse d’un pilotage de la fraude à distance depuis Abidjan, selon les enquêteurs.

Au-delà de l’enquête en cours, cette affaire met en lumière la vulnérabilité croissante des usagers des plateformes numériques face à des structures bien organisées, qui exploitent les failles des systèmes de paiement mobile et l’absence de régulation régionale stricte.

La DSC poursuit ses investigations, en lien avec ses homologues ivoiriens. En attendant, plusieurs centaines de victimes restent sans recours, leurs économies englouties dans cette cyberescroquerie transfrontalière.

La rédaction de la SENTV.info 

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