Haute Cour de justice : Ce qui attend les anciens ministres après la résolution parlementaire

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SENTV : Si l’Assemblée nationale adopte aujourd’hui la mise en accusation de cinq ex-membres du Gouvernement, une procédure judiciaire exceptionnelle s’enclenchera dès demain, dans un cadre rigoureusement encadré par la loi.

Ce jeudi 8 mai, l’Assemblée nationale du Sénégal se penche en séance plénière sur une résolution de mise en accusation de cinq anciens ministres du régime précédent : Mansour Faye, Aïssatou Sophie Gladima, Ismaïla Madior Fall, Moustapha Diop et Salimata Diop. Une décision historique qui, si elle est adoptée, déclenchera immédiatement l’engagement de la procédure devant la Haute Cour de justice.

Un vote décisif, une justice d’exception

Les députés de la 15ᵉ législature doivent se prononcer sur la comparution de ces ex-membres du Gouvernement devant la seule juridiction compétente pour juger des actes commis dans l’exercice de leurs fonctions ministérielles. Cette procédure est prévue par la Loi organique 2002-10, modifiée en 2008 et 2012, régissant la Haute Cour de justice.

Les accusations portent principalement sur la gestion controversée du Fonds Force Covid-19, à l’exception notable d’Ismaïla Madior Fall, ancien Garde des Sceaux, dont les responsabilités évoquées seraient d’une autre nature. Tous sont mentionnés dans une correspondance officielle du ministre actuel de la Justice, Ousmane Diagne, adressée à l’hémicycle.

Un calendrier accéléré, un cadre rigide

En cas d’adoption de la résolution, le processus judiciaire démarre dans l’immédiat : le président de l’Assemblée nationale transmet le texte au procureur général, qui a 24 heures pour saisir la Haute Cour de justice et convoquer la Commission d’instruction. Celle-ci entre alors en action sans délai.

Chaque ancien ministre mis en cause sera invité à désigner un avocat. En l’absence de choix, un défenseur leur sera désigné d’office. Cette disposition garantit le respect du droit fondamental à une défense effective dès l’ouverture des investigations.

Une instruction sous haute surveillance

Le président de la Commission peut initier des actes d’information — délivrance de mandats, perquisitions — avant même sa première réunion, sous réserve d’une confirmation ultérieure en séance. Des magistrats peuvent être appelés à intervenir avec voix consultative, assurant ainsi une articulation entre efficacité procédurale et indépendance judiciaire.

L’instruction suit les règles du Code de procédure pénale, mais ses actes sont exempts de tout recours, conférant à cette juridiction une autorité exceptionnelle. De plus, la Commission ne peut requalifier les faits initialement retenus par l’Assemblée. Tout fait nouveau doit être renvoyé au procureur général, puis à l’Assemblée, qui seule peut étendre la procédure.

Pas de parties civiles, pas d’indemnisation

Fait notable : la loi exclut formellement toute constitution de partie civile devant la Haute Cour. Les éventuelles victimes doivent se tourner vers les juridictions classiques pour espérer obtenir réparation. Cette séparation stricte entre le pénal et l’indemnitaire reflète une volonté claire de cloisonner les fonctions.

Vers un procès politique et juridique majeur

Ce jeudi pourrait donc marquer le point de départ d’une procédure longue, technique et politiquement sensible. Au-delà du sort des cinq ex-ministres, c’est aussi la crédibilité de la justice institutionnelle sénégalaise qui sera à l’épreuve, dans un contexte la lutte contre l’impunité est scrutée de près par l’opinion publique.

La rédaction de la SENTV.info 

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