Liberté de la Presse : La Cour Suprême Sonde les Limites du Pouvoir Réglementaire du Ministre de la Communication
SENTV : C’est un revers judiciaire retentissant pour le ministre de la Communication, Alioune Sall. Ce jeudi 12 juin 2025, la Cour suprême du Sénégal a suspendu la notification de cessation de parution visant le média en ligne Public SN, dirigé par la journaliste chevronnée Aïssatou Diop Fall. Cette décision intervient dans un contexte de vives tensions entre le pouvoir exécutif et les acteurs de la presse, et redéfinit les contours de l’exercice de l’autorité réglementaire sur les médias.
Le référé introduit pour excès de pouvoir par Me Abdou Dialy Kane, avocat de Public SN, a trouvé un écho favorable auprès de la plus haute juridiction administrative du pays. Il s’agit là d’un acte juridique fort, qui fait jurisprudence en matière de régulation des médias au Sénégal. « Le droit a parlé. La suspension prononcée empêche toute exécution de l’arrêté du ministre à l’encontre de Public SN », a réagi Me Kane, ajoutant que la version écrite de la décision est attendue pour le début de la semaine prochaine.
Une Riposte Légale à un Arrêté Contesté
Le ministre Alioune Sall avait pris, il y a quelques semaines, un arrêté ministériel controversé visant plusieurs médias supposés « non conformes », dont Public SN. Dix organes de presse au total avaient reçu la notification de cessation de parution ou de diffusion. L’arrêté avait provoqué une onde de choc dans le secteur, forçant certaines entreprises médiatiques à cesser leurs activités et mettant au chômage des dizaines de professionnels.
Si un premier référé avait été rejeté pour vice de forme, cette nouvelle initiative juridique a permis de remettre en question, sur le fond, la légalité de l’acte administratif. Et cette fois, le juge a tranché en faveur de la liberté de la presse.
Une Victoire Incontestée pour le Secteur des Médias
Pour le CDEPS (Comité pour la Défense des Droits des Journalistes et des Acteurs des Médias), cette suspension est bien plus qu’une victoire juridique : c’est un signal fort envoyé à l’exécutif. « C’est un précédent. Le juge a reconnu que les actes du ministre, notamment les listes dites ‘officielles’ de médias reconnus par l’État, sont désormais sans effet légal », a déclaré Mamadou Ibra Kane, président du comité.
La décision intervient alors que de nombreuses voix s’élevaient pour dénoncer un climat de plus en plus délétère pour les libertés fondamentales, notamment celle d’informer. Plusieurs organisations de défense des droits humains et des associations de journalistes, locales comme internationales, avaient exprimé leurs inquiétudes après l’arrêté du MCTN.
Ce coup d’arrêt imposé au ministre pourrait forcer l’État à revoir en profondeur sa stratégie de régulation du secteur. Si des lacunes légales existent, la réponse ne saurait se faire par des décisions unilatérales perçues comme arbitraires.
Le Sénégal, historiquement considéré comme un modèle de pluralisme médiatique en Afrique de l’Ouest, joue ici une carte déterminante pour la consolidation de son système démocratique. La décision de la Cour suprême remet sur la table la nécessité d’un dialogue élargi entre le gouvernement, les professionnels des médias et les organes de régulation.
La rédaction de la SENTV.info