Post-présidentielle sous tension : un scandale de 546 milliards de FCFA en titres CNO secoue la gouvernance budgétaire

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SENTV : Un nouveau scandale financier éclabousse la gestion des finances publiques sénégalaises, à la lumière du référé transmis par la Cour des comptes. Selon les révélations documentées dans ce rapport, l’État a procédé à l’émission irrégulière de Certificats nominatifs d’obligations (CNO), pour un montant colossal de 546,70 milliards de FCFA, auxquels s’ajoutent près de 59 milliards d’intérêts, dans un contexte politique particulièrement sensible.

Des CNO signés en pleine transition politique

Les CNO – instruments financiers servant habituellement à convertir des dettes de l’État en obligations formelles – ont été émis en partie après le scrutin présidentiel du 24 mars 2024, dans un contexte de fin de mandat. Parmi les cas les plus significatifs, six titres ont été émis au nom de la Banque de Dakar (BDK) le 27 mars 2024, soit trois jours seulement après l’élection, pour un montant de 117,16 milliards de FCFA, destiné à couvrir des dettes contractées en 2023 et 2024. Avec les intérêts, l’État devra rembourser 121,2 milliards de FCFA.

Cette décision, prise alors que les résultats du scrutin étaient déjà connus, soulève de nombreuses interrogations sur l’opportunité et la transparence de la démarche. La Cour des comptes dénonce notamment un contournement des circuits classiques d’exécution budgétaire.

Lansar Auto et la titrisation de créances logistiques

Autre exemple troublant : quatre CNO ont été émis le 29 mars 2024 au nom de la société Lansar Auto Suarl, pour un montant cumulé de 16,57 milliards de FCFA. Ces titres visent à couvrir des créances liées à la location de véhicules pour les services de l’État entre 2020 et 2023, dans le cadre d’événements officiels. Une partie de la dette provient d’un contrat signé en janvier 2023 par un cadre de la Direction générale du Budget.

Si le besoin logistique est avéré, la procédure de titrisation en fin de mandat, sans appel d’offres public, est jugée peu orthodoxe et porteuse de surcoûts.

Coris Bank, Sofico et la chaîne de créances publiques

Plus en amont, neuf CNO ont été émis entre septembre 2023 et février 2024 au profit de Coris Bank, pour un total de 100,29 milliards de FCFA. Ces opérations ont permis de régler des dettes envers la société Sofico, de couvrir des échéances bancaires et de payer des marchés publics du ministère de l’Environnement.

Certaines de ces créances concernent également la société CBI, à qui l’État devait des fonds pour des prestations diverses. La Cour des comptes y voit une prise de risque excessive, avec des engagements pris en dehors des normes budgétaires classiques.

Une gouvernance budgétaire en question

Ces révélations interviennent alors que les nouvelles autorités issues de l’élection présidentielle prennent progressivement la main sur l’appareil d’État. La publication du référé de la Cour des comptes, dont les détails sont rapportés par L’Observateur, alimente le débat sur la transparence, la redevabilité et la rigueur budgétaire en période de transition.

En procédant à des engagements financiers majeurs hors calendrier parlementaire et sans traçabilité complète, l’État aurait mis en péril sa discipline budgétaire, avec à la clé des charges financières supplémentaires pour les années à venir.

Une enquête parlementaire à prévoir ?

Face à l’ampleur des montants engagés, de nombreuses voix s’élèvent pour exiger une enquête indépendante, voire la saisine de la justice. Certains observateurs appellent à revoir les procédures de titrisation des dettes publiques, afin de garantir qu’elles ne servent pas à masquer des engagements hors budget ou à faire passer des dépenses sans contrôle démocratique.

Le scandale des CNO, révélé après l’élection présidentielle, pourrait bien devenir l’un des premiers grands tests de transparence et de responsabilité du nouveau pouvoir.

La rédaction de la SENTV.info 

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