Projet gazier GTA : Lourd soupçon de fraude douanière sur dix navires, la DIC saisie pour une affaire à 845 milliards F CFA

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SENTV : Le projet gazier Grand Tortue Ahmeyim (GTA), symbole de l’ambition énergétique du Sénégal, est désormais au cœur d’une vaste affaire de fraude douanière présumée. Le parquet financier a ordonné l’ouverture d’une enquête confiée à la Division des investigations criminelles (DIC), suite à une plainte déposée par la Douane sénégalaise contre la société Mc Dermott, ainsi que ses partenaires Oma Sénégal SA et Oma Logistics SA. Au cœur du dossier : la disparition inexpliquée ou non-déclaration de dix navires affrétés dans le cadre du méga-projet gazier offshore, avec un préjudice estimé à plus de 845 milliards de francs CFA.

Une plainte douanière aux implications internationales

Selon les informations rapportées par Libération, l’affaire prend naissance dans la gestion des procédures douanières liées à des navires affrétés pour le compte de Mc Dermott, prestataire clé du projet GTA. La société américaine avait mandaté deux firmes locales, Oma Sénégal et Oma Logistics, pour effectuer l’ensemble des démarches administratives et douanières afférentes à l’exploitation des navires dans les eaux territoriales sénégalaises.

Six de ces navires avaient bénéficié d’une admission temporaire exceptionnelle (ATE) — un régime douanier permettant aux navires étrangers d’opérer sans payer de droits d’importation, à condition qu’ils restent dans la zone économique exclusive (ZEE) du Sénégal.

Mais les autorités douanières ont constaté des irrégularités majeures :

  • Six navires sont sortis de la ZEE sans déclaration, violant ainsi les termes de l’ATE ;

  • Quatre autres navires n’ont jamais accosté ni opéré dans les eaux sénégalaises, bien qu’ayant été déclarés dans les formalités douanières.

Ces anomalies constituent des infractions caractérisées au Code des douanes sénégalais, notamment pour exportation sans déclaration, non-représentation de marchandises sous douane et non-respect des engagements douaniers.

Un préjudice colossal : 845 milliards en jeu

Selon les estimations de l’administration douanière, le manque à gagner potentiel pour l’État s’élèverait à 845 milliards 51 millions 333 mille 11 F CFA. Une somme qui, si elle était avérée, représenterait l’un des plus grands préjudices financiers liés à une fraude douanière dans l’histoire économique récente du pays.

Ce chiffre inclurait non seulement les droits et taxes non perçus, mais également les pénalités prévues par la réglementation en vigueur pour falsification ou simulation d’opérations commerciales dans un secteur aussi stratégique que celui de l’énergie.

La DIC à la manœuvre, l’enquête démarre

Saisie par le parquet financier dirigé par le procureur Abdoulaye Sylla, la Division des investigations criminelles (DIC) est chargée de retracer les flux logistiques et financiers entre Mc Dermott et ses partenaires locaux, et de déterminer la responsabilité pénale de chacun.

L’enquête devrait également s’étendre aux complicités potentielles au sein des services portuaires, aux modalités d’attribution des autorisations temporaires, et à la traçabilité des mouvements des navires via le système AIS (Automatic Identification System).

Une affaire qui jette une ombre sur le projet GTA

Le projet gazier GTA, développé à la frontière maritime entre le Sénégal et la Mauritanie, représente un investissement de plusieurs milliards de dollars piloté par BP, Kosmos Energy, Petrosen et SMHPM. Il est censé propulser le Sénégal dans le cercle des exportateurs de gaz naturel liquéfié (GNL) dès 2025.

Mais cette affaire de « navires fantômes » risque de ternir l’image du projet. Elle soulève également des inquiétudes sur la gouvernance, la transparence des processus logistiques dans le secteur extractif, et sur la fiabilité du suivi douanier des opérations maritimes dans les zones offshore à haute valeur stratégique.

Vers une réponse judiciaire exemplaire ?

Face à l’ampleur du préjudice allégué, les autorités judiciaires semblent déterminées à aller au fond des choses. Selon une source proche du parquet, « le Sénégal ne peut se permettre de laisser passer une affaire de cette envergure sans réponse ferme ».

En attendant les résultats de l’enquête de la DIC, les milieux économiques et diplomatiques suivent le dossier avec une attention particulière, tant ses implications dépassent les frontières nationales et touchent à l’intégrité du processus d’exploitation des ressources naturelles.

La rédaction de la SENTV.info 

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