SONATEL : le gouvernement s’engage face aux alertes syndicales sur les dérives de gouvernance
SENTV : Le climat social et stratégique au sein de la Société nationale des télécommunications du Sénégal (SONATEL) connaît une inflexion majeure. Le chef du gouvernement a rencontré ce lundi l’intersyndicale de l’entreprise, à la suite d’une série de préoccupations jugées critiques pour l’avenir de ce fleuron des télécoms en Afrique de l’Ouest.
Durant cette entrevue qualifiée d’« approfondie » par les deux parties, les représentants syndicaux ont exposé une série de griefs relatifs à la gouvernance de l’opérateur, détenu à 42,33 % par l’État sénégalais (via le FONSIS, le FONGIP et d’autres participations publiques directes et indirectes), et à 42,33 % également par le groupe français Orange, partenaire stratégique historique.
Parmi les points saillants soulevés figurent :
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Des blocages internes freinant la croissance externe de SONATEL, pourtant essentielle à son rayonnement sous-régional face à la montée en puissance des géants internationaux du numérique ;
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Un Conseil d’administration jugé déséquilibré, dont la composition ne refléterait pas la structure réelle de l’actionnariat. Le pouvoir de décision y serait biaisé en faveur de l’actionnaire minoritaire stratégique ;
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Des zones d’ombre sur les processus de nomination du Directeur Général, qui, selon l’intersyndicale, seraient largement influencés par l’étranger, en contradiction avec les principes de souveraineté économique ;
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Des clauses contractuelles asymétriques, notamment dans les conventions liant SONATEL au groupe Orange, qui limiteraient la marge de manœuvre stratégique du Sénégal ;
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Un déficit de transfert de compétences, pourtant prévu dans les accords bilatéraux, mais accusant de sérieux retards dans leur mise en œuvre.
Le Premier ministre, à l’issue de cette rencontre, a affirmé son soutien total aux travailleurs et cadres de la SONATEL, réitérant la volonté ferme du gouvernement de défendre les intérêts stratégiques du Sénégal dans ce secteur névralgique. « La souveraineté économique n’est pas une option. Elle est au cœur de notre action », a-t-il martelé devant la presse.
Ce positionnement marque une inflexion significative dans les relations entre l’État sénégalais et le partenaire Orange, dont la présence dans le capital de la SONATEL remonte à 1997, à l’occasion de la privatisation partielle de l’opérateur. Depuis, SONATEL s’est imposée comme leader régional, opérant également au Mali, en Guinée, en Sierra Leone et au Burkina Faso.
Mais cette croissance ne semble plus suffisante à certains observateurs, qui s’inquiètent d’une dépendance technologique et stratégique croissante vis-à-vis de l’actionnaire français, dans un contexte mondial marqué par la montée des enjeux de souveraineté numérique.
Vers une refonte du modèle de partenariat ?
Si aucune mesure concrète n’a été annoncée pour l’instant, des sources proches du dossier évoquent la possibilité d’une renégociation des accords-cadres entre l’État et Orange. Une telle démarche pourrait inclure une révision des droits de vote au sein du Conseil d’administration, un renforcement des exigences de transfert de compétences, voire une restructuration de la gouvernance exécutive de SONATEL.
La balle est désormais dans le camp de l’exécutif, dont les intentions, bien que claires sur le plan rhétorique, devront se traduire par des actions tangibles. Pour l’intersyndicale, qui promet de rester mobilisée, il s’agit avant tout de « garantir l’intégrité, la cohésion interne et l’indépendance stratégique de l’entreprise, au service du développement national ».



La rédaction de la SENTV.info