Veille du 23e anniversaire du Joola : Une mémoire qui résiste au naufrage du silence
Dans la région de Ziguinchor comme à Dakar, des cérémonies religieuses, des veillées et des marches du souvenir sont prévues. Au-delà de l’émotion collective, le sentiment d’injustice non réparée reste vif, alimenté par l’absence de poursuites judiciaires,
Un drame qui dépasse les chiffres
Le 26 septembre 2002, le navire Le Joola, assurant la liaison maritime entre Ziguinchor et Dakar, chavire au large des côtes gambiennes dans des conditions météorologiques difficiles. Le bateau transportait près de 2 000 passagers, soit plus du triple de sa capacité.
Bilan : 1 863 morts et disparus officiellement recensés, dont une majorité de femmes, d’enfants et d’étudiants. À ce jour, seulement 65 personnes ont survécu. Une hécatombe nationale. Et pourtant, aucune condamnation, ni même de procès, n’a eu lieu au Sénégal.
Le mémorial de Mbao, lieu symbolique de recueillement pour les familles, accueillera comme chaque année les principales cérémonies. Toutefois, les critiques fusent sur son état de délabrement, preuve, selon certains, d’un désengagement progressif de l’État.
L’indignation ne porte pas seulement sur le naufrage en lui-même, mais sur la gestion post-tragédie :
Aucune responsabilité administrative ou politique n’a été retenue. Le rapport d’enquête sénégalais de 2003 a été classé sans suite. La procédure judiciaire ouverte en France a été close en 2014 par un non-lieu. Les familles réclament toujours la vérité, un vrai procès, et la reconnaissance de toutes les victimes, y compris celles non enregistrées.
Plus de deux décennies se sont écoulées, mais le traumatisme collectif reste profond. Des jeunes qui n’étaient pas encore nés en 2002 portent aujourd’hui le flambeau de la mémoire, via des initiatives artistiques, des documentaires, ou des campagnes sur les réseaux sociaux.
Le naufrage du Joola n’est pas seulement une tragédie maritime, c’est un symbole des défaillances structurelles, de la fragilité des institutions face à la responsabilité, et de la capacité de la société sénégalaise à résister à l’oubli.
Demain, un nouveau 26 septembre : et après ?
Alors que le Sénégal se prépare à vivre une nouvelle journée de deuil, les attentes restent intactes : un procès, une réparation morale, et surtout une réforme profonde du système de transport et des responsabilités publiques.
Car si le bateau a coulé, la vérité, elle, ne doit pas sombrer.
Par la rédaction de la SENTV.info