Kaolack sous tension : Quand le préfet franchit la ligne rouge face au maire Serigne Mboup

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SENTV : Ce qui devait être une simple cérémonie de reboisement à Kaolack s’est transformé en incident politique majeur. Devant des dizaines de citoyens rassemblés pour l’occasion, le préfet du département a publiquement interpellé le maire Serigne Mboup dans des termes d’une rare violence verbale : « Dégage ! », lui aurait-il lancé. Une phrase choquante, prononcée dans le quartier même du maire, qui a immédiatement enflammé la toile et provoqué l’indignation d’une partie de l’opinion publique.

Un préfet en rupture avec son devoir de réserve ?

Cette sortie du représentant de l’État, lui-même censé incarner la neutralité républicaine, a suscité de vives réactions dans les milieux politiques et citoyens. S’en prendre publiquement à un élu local, chef de l’exécutif municipal, revient non seulement à piétiner l’éthique administrative, mais aussi à remettre en cause la hiérarchie institutionnelle dans un État décentralisé.

« Un préfet ne peut et ne doit pas s’autoriser de tels écarts de langage, surtout en public, devant les administrés », déplore un ancien cadre de l’administration territoriale, sous couvert d’anonymat.

Un écho au passé : l’ombre persistante du commandement colonial

Pour plusieurs observateurs, ce dérapage verbal illustre une persistance des réflexes autoritaires dans la haute administration sénégalaise, héritée du système colonial. L’esprit du « commandant de cercle », figure toute-puissante de l’époque coloniale, semble toujours planer sur certaines pratiques préfectorales, malgré les évolutions constitutionnelles en matière de décentralisation.

En effet, le maire est un élu du peuple, tandis que le préfet est un haut fonctionnaire nommé par décret. L’équilibre entre ces deux légitimités repose sur le respect mutuel de leurs prérogatives. Or, la scène de Kaolack envoie un signal contraire : la verticalité autoritaire semble l’emporter sur la légitimité démocratique.

Une fonction élective humiliée, la défiance citoyenne aggravée

L’humiliation publique d’un maire, devant ses administrés, ne saurait être reléguée au rang d’anecdote. Elle porte atteinte à la symbolique de la fonction élective, fragilise la démocratie locale et renforce une défiance déjà palpable entre l’État et les citoyens.

Plus encore, dans une période où le pays tente de restaurer la confiance après les traumatismes des années 2021–2023 – marquées par une répression meurtrière de manifestants (plus de 80 morts selon des organisations indépendantes) – cet épisode ravive les blessures laissées par une administration perçue comme brutale, voire complice d’abus de pouvoir.

Des arbres à planter, une autorité à déraciner ?

Le symbole est fort : alors que la cérémonie visait à sensibiliser sur l’urgence environnementale à travers le reboisement, c’est la culture démocratique qui semble avoir été arrachée à la racine. La scène de dimanche laisse cette impression troublante : ce ne sont pas des arbres qu’on voulait déraciner à Kaolack, mais une autorité élue.

Vers une crise institutionnelle ?

L’épisode appelle une réaction officielle du ministère de l’Intérieur, dont dépend la hiérarchie préfectorale. Faut-il rappeler que le rôle du préfet est d’assurer la coordination des services de l’État dans le département, et non de s’ériger en rival des élus locaux ?

Aucune réaction officielle n’a encore été enregistrée du côté des services de l’État au moment de la rédaction de cet article. De son côté, le maire Serigne Mboup n’a pas encore fait de déclaration publique.

La rédaction de la SENTV.info 

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