SENTV : Le Sénégal a officiellement suspendu son accord d’extradition avec la France, une décision annoncée jeudi à Dakar par la garde des Sceaux, Yassine Fall, lors de l’examen du budget 2026 de son ministère. Cette mesure, qualifiée de « nécessaire » par la ministre, restera en vigueur tant que Paris ne donnera pas une suite favorable aux demandes sénégalaises visant deux ressortissants recherchés par la justice nationale.
« Nous avons décidé de suspendre toute extradition vers la France, jusqu’à ce qu’elle réponde à nos demandes d’extradition concernant deux de nos compatriotes », a déclaré Yassine Fall devant les députés, soulignant un blocage persistant dans la coopération judiciaire entre les deux États. Parmi les personnes visées figure le journaliste Madiambal Diagne, président-directeur général du Groupe Avenir Communication, dont Dakar réclame la remise.
L’accord d’extradition liant les deux pays permettait jusqu’ici à la justice française de solliciter la remise de prévenus résidant au Sénégal. Selon la garde des Sceaux, la plupart des demandes reçues de Paris concernent des ressortissants français, parfois binationaux. Sur la seule période 2024-2025, le Sénégal a été destinataire d’une vingtaine de requêtes françaises, dont seulement trois ont reçu une suite favorable, tandis que quatre ont été refusées.
Mais c’est l’absence de réponse de la France à deux demandes jugées prioritaires par Dakar qui a fini de tendre les relations bilatérales. En réaction à ce « blocage », le Sénégal a décidé de ne pas donner suite à dix requêtes françaises, a précisé la ministre. Désormais, douze nouvelles demandes d’extradition en provenance de Paris entrent automatiquement dans le champ de la suspension annoncée.
Yassine Fall insiste : la réciprocité sera appliquée « strictement ». Ainsi, les personnes recherchées par la justice française et localisées au Sénégal pourront toujours faire l’objet d’interpellations, mais ne seront en aucun cas remises aux autorités françaises tant que le différend perdurera. « Nous les ferons arrêter si nécessaire, mais nous ne les extraderons pas », a martelé la garde des Sceaux.
Cette décision intervient alors que le ministère de la Justice présente un budget 2026 en légère progression, avec 81,35 milliards de francs CFA en autorisations d’engagement et 81,01 milliards en crédits de paiement. Un contexte budgétaire qui ne masque pas la fermeté nouvelle affichée par Dakar sur le terrain de la coopération judiciaire internationale.
La suspension de l’accord d’extradition marque une étape inédite dans les relations entre les deux pays et ouvre une période d’incertitude diplomatique, à l’heure où la coopération sécuritaire demeure un pilier des échanges franco-sénégalais.