Massacre de Thiaroye : 81ans après, les fouilles brisent le silence des archives et révèlent l’ampleur occultée du drame

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SENTV : Ce 1ᵉʳ décembre 2025, le massacre de Thiaroye s’impose de nouveau au cœur de l’actualité nationale. Le Président Bassirou Diomaye Faye présidera ce lundi la cérémonie officielle du 81ᵉ anniversaire du drame.
Mais cette édition a un relief inédit : les premières conclusions des fouilles archéologiques menées sur le site du camp militaire bouleversent les récits établis et confirment, avec une rare force matérielle, la violence systémique longtemps minimisée par l’histoire coloniale.

Selon les premières analyses de la sous-commission archéologie de la Commission « Massacre de Thiaroye », les tombes visibles aujourd’hui ne correspondent pas aux véritables lieux d’inhumation des tirailleurs exécutés le 1ᵉʳ décembre 1944.
Les sépultures authentiques se trouvent en dehors du carré officiel, parfois regroupées, parfois orientées différemment des stèles coloniales.

Ces anomalies accréd itent deux pistes majeures :

l’existence probable d’une ou plusieurs fosses communes masquées,

la création de tombes factices destinées à valider la version française, qui n’a jamais reconnu plus de 34 victimes.

Or, les chercheurs le rappellent : les témoignages sénégalais et africains ont toujours évoqué des dizaines, voire des centaines de morts, exécutés au retour du front pour avoir simplement réclamé leurs soldes.

Corps enchaînés, mutilés, incomplets : les preuves matérielles de l’horreur

Les restes exhumés livrent un constat glaçant. Les anthropologues ont relevé :

des squelettes incomplets, avec côtes, vertèbres ou bassins manquants ;

des crânes absents pour certains corps ;

des marques attestant l’utilisation de chaînes ;

des blessures compatibles avec des exécutions sommaires ou des violences extrêmes.

Ces éléments contredisent radicalement le discours colonial affirmant une simple « mutinerie réprimée » et plaident pour un massacre prémédité et orchestré.

Les fouilles ont également révélé des objets formels attestant du rang militaire des morts :
épaulettes, décorations, insignes…
Ces pièces contredisent les narratifs visant à présenter les tirailleurs comme des « insubordonnés » ou des « perturbateurs », et confirment que nombre d’entre eux étaient des soldats décorés, revenus des fronts européens où ils avaient combattu pour la France.

Certaines sépultures contiennent des coffrages en bois, un procédé inhabituel pour des enterrements réalisés dans l’urgence.
Plusieurs hypothèses émergent :

présence de soldats africains morts ailleurs puis transférés à Thiaroye ;

possible inhumation de personnels français (militaires ou civils) au milieu des tirailleurs ;

ou encore tentatives de dissimulation après le drame.

Ces éléments ouvrent de nouvelles pistes d’enquête pour la Commission, dont le travail s’étendra sur plusieurs mois.

Ces découvertes donnent une résonance particulière au combat engagé par le Président Bassirou Diomaye Faye, qui réclame depuis son accession au pouvoir la déclassification des archives françaises liées au massacre.

Lors de la remise du Livre blanc le 16 octobre dernier, il déclarait :
« La vérité historique ne se décrète pas, elle s’exhume. »

L’État sénégalais entend désormais faire de Thiaroye non plus un dossier mémoriel figé, mais une enquête historique active, visant à réhabiliter la mémoire des tirailleurs originaires de 17 pays d’Afrique.

En présidant cette cérémonie du 1ᵉʳ décembre, devenue Journée du Tirailleur, le chef de l’État renouvellera l’engagement de conduire la vérité « jusqu’à la dernière pierre soulevée ».
Pour les familles, les historiens et les nations concernées, ces fouilles marquent un retour décisif vers l’authenticité du récit africain, longtemps étouffé par les récits coloniaux.

À Thiaroye, 81 ans après, les sols parlent. Et leurs révélations appellent, plus que jamais, justice et reconnaissance.

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