Gestion trouble à La Banque agricole : 17 milliards FCFA alloués dans l’opacité à des sociétés privées sous couverture étatique
SENTV : Une nouvelle affaire à relents de scandale financier secoue le secteur bancaire public sénégalais. La Banque agricole est dans le viseur de la Cour des comptes après la découverte d’un mécanisme de financement opaque portant sur plus de 17 milliards de francs CFA, alloués à une série de sociétés privées bénéficiant d’une couverture étatique sans justification documentée.
Dans son dernier référé transmis au ministère de la Justice, la juridiction financière attire l’attention sur des « conventions de substitution de débiteurs » conclues le 20 novembre 2023 entre l’État et La Banque agricole, pour un montant exact de 17 495 473 426 francs CFA. Ces opérations, censées « accompagner les institutions financières pour préserver leur solvabilité et leur capacité de mobilisation de ressources », laissent planer de lourds soupçons de détournement de fonds publics.
Les bénéficiaires de ces montages financiers incluent une dizaine de sociétés aux profils disparates : Tacto Services Équipements Afrique, Agripo TV, Jamaries SA, Senteer, Complexe Seutou Indou, Établissement Moussa Gaye, Falilou Mbacké, Bio Energies Green, Fadema SAU, et Yanawa. Autant d’entités désormais citées dans un référé confidentiel, dont des extraits ont fuité dans la presse nationale, notamment dans L’Observateur, qui révèle l’affaire ce mercredi.
Ce que dénoncent les auditeurs de la Cour des comptes va au-delà d’une simple entorse aux règles de gouvernance. Selon leurs constats, la documentation transmise ne permet pas d’établir la nature de la relation contractuelle entre l’État, qui se substitue aux débiteurs, et les bénéficiaires des fonds. Pis encore, le fondement économique de l’opération n’est pas démontré, ce qui ouvre la porte à des soupçons d’enrichissement illicite et de favoritisme.
Dans leur rapport, les auditeurs soulignent le risque que « cette opération soit utilisée par les personnes en cause pour détourner les deniers publics ». Ils recommandent ainsi des suites judiciaires, appelant le parquet à se saisir du dossier.
Cette affaire ravive les préoccupations sur la transparence dans l’utilisation des ressources publiques, en particulier dans les établissements à capitaux publics comme La Banque agricole, historiquement dédiée à l’appui au monde rural et aux filières agricoles. La révélation d’une telle opération, dissimulée au regard du Parlement et de l’opinion, suscite déjà l’indignation de plusieurs acteurs de la société civile, qui appellent à « lever l’opacité sur les bénéficiaires réels de ces fonds et à situer toutes les responsabilités ».
Le ministère des Finances, tutelle directe de la Banque agricole, n’a pour l’instant pas réagi officiellement. Mais selon des sources proches du dossier, une mission d’inspection pourrait être diligentée dans les prochains jours, alors que d’autres établissements financiers publics seraient également dans le collimateur.
La rédaction de la SENTV.info