SENTV : Longtemps marginalisée dans la dynamique industrielle nationale, la région de Matam semble aujourd’hui engagée sur une trajectoire de transformation historique. À l’occasion d’un Comité régional de développement (CRD) tenu récemment, le ministre de l’Industrie et du Commerce, Dr Serigne Guèye Diop, a présenté les contours d’une stratégie ambitieuse articulée autour de la valorisation du phosphate, ressource encore sous-exploitée dans cette zone du nord-est du Sénégal.
Accompagné de M. Ibrahima Thiam, Secrétaire d’État au Développement des PME-PMI, ainsi que de plusieurs cadres ministériels, le ministre a exposé aux élus locaux et aux acteurs économiques régionaux un plan d’envergure, inscrit dans l’Agenda de Transformation 2050.
De l’extraction brute à la valeur ajoutée : une rupture stratégique
« Depuis 65 ans, les gouvernements successifs n’ont pas réussi à impulser une véritable industrialisation dans cette région pourtant riche en phosphate », a déclaré le ministre. Cette ressource, jusqu’ici principalement destinée à l’exportation, n’a généré que peu de retombées locales en matière d’emploi ou de recettes fiscales. La nouvelle politique mise en œuvre rompt avec cette logique.
Le plan gouvernemental prévoit ainsi :
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La création d’une usine d’engrais et d’un complexe phosphaté pour transformer localement les matières premières ;
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L’implantation d’une Académie du Phosphate pour former des techniciens et ingénieurs locaux ;
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La mise en place d’un centre de recherche appliquée, centré sur l’exploitation minière durable et les applications agricoles ;
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L’exploitation de minéraux connexes, souvent associés au phosphate, ouvrant de nouvelles perspectives industrielles.
L’ambition : atteindre une production annuelle de 2 millions de tonnes d’engrais et développer de nouveaux débouchés dans l’agroalimentaire et les technologies vertes, notamment la fabrication de composants pour batteries de véhicules électriques.
Un levier de croissance pour le PIB régional
Dr Serigne Guèye Diop voit en cette stratégie un levier puissant pour l’économie locale : « Le pôle de Matam peut passer de moins de 1% du PIB national à près de 9% d’ici 2050, en créant des centaines de milliers d’emplois directs et indirects dans la chaîne de valeur industrielle. »
Ce projet entre en cohérence avec l’ambition exprimée par le Premier ministre Ousmane Sonko, lors du lancement du PAVIE II, de bâtir un Sénégal souverain et autonome, fondé sur une valorisation endogène des ressources. Le chef du gouvernement a souligné le rôle catalyseur des partenaires comme la Banque africaine de développement (BAD) et l’Agence française de développement (AFD), dans le financement de projets structurants.
« Avec le PAVIE, ce sont aussi ces milliers de femmes et de jeunes, de tous les coins du Sénégal, qui ont réussi le pari de l’autonomisation économique et sociale », a rappelé Ousmane Sonko, saluant au passage le travail de la DER/FJ et de sa déléguée générale, Mme Aïssatou Mbodj.
Matam, vitrine du nouveau Sénégal industriel ?
Dans un contexte de redéfinition du modèle économique sénégalais, la région de Matam pourrait bien devenir un laboratoire national de la transformation locale. Avec des infrastructures adaptées, une main-d’œuvre formée, et une volonté politique affirmée, le pari de l’industrialisation par la ressource semble plus que jamais à portée de main.
La rédaction de la SENTV.info